Nécrologie 2003

Adios Hermanos !
1er février 2003, Miami, Mongo Santamaria à 85 printemps nous quitte pour de bon. Né à La Havane en 1922, Ramon « Mongo » Santamaria fut ce génial percussionniste qui, dans la foulée de Chano Pozo, intégra comme une évidence les polyrythmies afro-cubaines dans le jazz, et ce, depuis les années quarante. Initié par son grand-père, ancien esclave d’origine bantoue, il devient vite à La Havane le plus réputé des congueros : dès 1948, il enchaîne enregistrements et tournées au Mexique, puis aux States, à New York où il joue aux côtés de Gilberto Valdes, de Perez Prado, le « roi du manbo », de Tito Puente et de Dizzy Gillespie. Rythmes yorubas et groove be-bop se révolutionnent mutuellement : à son actif, deux compositions d’anthologie Sofrito et Afro Blue dont on ne compte plus les versions.
14 juillet 2003, Compay Segundo a tiré sa révérence. Adulé à Cuba et dans le monde entier, le chanteur et compositeur est décédé à La Havane à 95 ans des suites d’une insuffisance rénale. Né en novembre 1907 à Siboney, près de Santiago, dans la province de l’Oriente, le vieux compère a tenu à être inhumé dans le cimetière de Santa Ifigenia, près de la tombe de José Martí, autre héros national cubain. De son vrai nom Maximo Francisco Repilado Muñoz, le jeune homme se passionne très tôt pour la musique des trovadores, ces baladins colportant de village en village nouvelles et chansons, apprend à fumer le cigare avant de savoir lire, s’initie très tôt au violon et à la guitare, tâte de la clarinette dans la fanfare municipale de Santiago et compose ses premières chansons à seize ans sur un instrument à sept cordes doubles baptisé « harmonico ». Réaliste sur le sort des intermittents du spectacle, il apprend le métier de barbier puis exerce celui de tabaquero, rouleur de cigare, une activité qu’il conservera jusqu’à la retraite, passant de la manufacture de Santiago à celle de La Havane. Sa carrière de musicien débute en 1934 : Compay Segundo grave ses premiers 78-tours, tourne au Mexique mais peine à imposer le son, jugé trop rustique dans les dancings de La Havane, alors voués au danzon. En 1948, il crée Los Compadres (Les Compères), avec Lorenzo Hierrezuelo, duo dans lequel il chante la seconde voix, dite segunda. De là vient son surnom. La révolution des barbudos vient interrompre l’animation musicale pour un temps. Devenu  musicien fonctionnaire, il passe même deux ans en Chine Populaire comme membre d’une délégation cubaine et participe à sa façon à "l’édification du socialisme" en étudiant le Petit Livre Rouge et le savoir-faire agricole des riziculteurs chinois. Oublié de tous, il complète sa modeste retraite en jouant dans les hôtels pour touristes. C’est alors que Eliades Ochoa, directeur du Cuarteto Patria à Santiago, repère ce qui va devenir un tube planétaire, le thème Chan Chan, composé à quatre-vingt-dix ans passés. Compay Segundo est révélé par le film Buena Vista Social Club du cinéaste allemand Wim Wenders, sorti en 1999, deux ans après l’album du même nom qu’il avait enregistré avec Omara Portuonde, Ibrahim Ferrer, Ruben Gonzalez et Eliades Ochoa. Il enchaîne alors – en complet veston et panama vissé sur la tête – les tournées aux quatre coins du monde.

Discographie indispensable
Lo mejor de le Vida, 1998, East West S.A.
Calle Salud, 1999, East West S.

8 décembre 2003 : le pianiste cubain Ruben Gonzalez est mort à son domicile de La Havane, à l’âge de 84 ans. Ruben Gonzalez souffrait depuis longtemps d’arthrite, de problèmes rénaux et pulmonaires. Les séquences qui lui sont consacrées dans le film sorti en 1999 Buena Vista Social Club, projet du guitariste américain Ry Cooder et du cinéaste allemand Wim Wenders, étaient à cet égard pleines d’émotion. On le voit jouer dans un de ces vieux hôtels de La Havane, transformé en salle de gym, ou désœuvré, sans piano, déjà affaibli par la maladie, mais l’œil pétillant et comme stimulé par ses vaillants partenaires, Compay Segundo, Omara Portuondo, Cachaito ou bien encore Ibrahim Ferrer. Ruben Gonzalez est né en avril 1919 dans la province de Santa Clara et s’initie très tôt au piano. Il contribue à ressusciter le son, style cubain de la première moitié du vingtième siècle. Il tourne ensuite dans les clubs au Panama, en Argentine, à Cuba avant de tomber dans l’oubli jusque la renaissance des années 90.